Le carême de l’Avent couvre, comme le carême pascal, une période de quarante jours, allant du 15 novembre au 25 décembre. Il coïncide avec la diminution des jours les plus courts de l’année précédant le premier jour qui va en augmentant, appelé dans l’antiquité le jour du « soleil invaincu », où fut établie la fête de la Nativité.
Le mot Avent signifie venue, avènement. L’Église se prépare à la venue du Christ sur la terre en se transposant spirituellement, en quelque sorte, dans l’ère qui a précédé le Messie, dans cette longue époque où le peuple hébreu, selon les paroles du prophète Isaïe, attendait qu’enfin Dieu « déchire les cieux » pour venir sur terre. De même, comme en miroir, le temps qui suit le Messie, à partir de la Pentecôte, est celui qui précède la venue des choses dernières, l’établissement du Royaume.
En Occident, l’Avent semble tourné vers la naissance du petit enfant à Bethléem, qui est fêtée avec un faste particulier, comme le point culminant de l’année liturgique ; en Orient, l’Avent semble davantage tourné vers la lumière de l’Épiphanie, vers la première éclatante manifestation trinitaire de Dieu.
Sur le plan liturgique, le temps de l’Avent nous prépare à fêter l’Incarnation du Christ, mais sans l’intensité, sans l’effort ascétique du carême de Pâques. Trois temps forts viennent toutefois jalonner notre route.
La présentation au temple de la Très Sainte Mère de Dieu : 21 novembre
La présentation au temple est traditionnelle chez les Juifs. Elle est reprise chez les orthodoxes dans une courte cérémonie précédant la première communion d’un nouveau baptisé. Joachim et Anne présentent leur fille Marie, âgée de trois ans, au grand-prêtre Zacharie dans le temple. D’après la tradition, elle y restera jusqu’à l’annonciation de l’ange Gabriel. Cette période de vie apparaît ainsi comme un temps de maturation, de méditation, d’abandon confiant aux desseins de Dieu, de préparation spirituelle au grand événement qui devait faire d’elle le temple du Seigneur. En la Vierge Marie se résume toute l’attente messianique du peuple d’Israël, qui trouve en elle son accomplissement. Certaines hymnes de la fête (les catavasia) annoncent déjà la Nativité, l’événement suprême où la Sainte Vierge réalisera le dessein de Dieu pour l’humanité:
« Le Christ naît, glorifiez-Le ; le Christ descend des cieux, allez à sa rencontre… »
Ces hymnes constituent les premiers chants du canon de Noël et seront chantées jusqu’au 31 décembre (clôture de la Nativité).
Le dimanche des ancêtres du Seigneur : avant-dernier dimanche avant noël.
L’Église célèbre les ancêtres du Seigneur, qui, depuis Adam, en passant par les patriarches et les prophètes, aboutissent à saint Jean-Baptiste, le dernier prophète de l’Ancien Testament : « Réjouissons-nous ensemble, nous les amis des Pères, dans la commémoration de leur souvenir… ». Directement inspirés par l’Esprit de Dieu, ces hommes ont préparé, annoncé l’arrivée du Messie, aplani ses sentiers, gémi bien souvent dans l’attente de la réalisation des promesses, pris part à la maturation du temps.
Nous avons une dette de reconnaissance à leur égard. Nous sommes les héritiers spirituels de ces hommes qui ont contribué à leur façon à la naissance de l’Église, et celle-ci n’omet point de les nommer au début de la liturgie, lors de la préparation de la proscomédie. N’oublions pas que l’Ancien Testament, que nous devons connaître et lire avec amour, est une Parole inspirée par l’Esprit Saint, qui nous introduit au plan rédempteur de Dieu.
Le dimanche des Pères ou de la Généalogie : dernier dimanche avant noël.
L’Église élargit la notion des ancêtres à celle des justes de l’Ancien Testament « scintillant par la foi comme des étoiles ». L’Église en ce jour veut associer ces hommes ou ces femmes à la joie de la Nativité, « les invitant tous par des louanges et des chants divins à préparer la naissance du Christ ». La lecture de l’Évangile est celle du premier chapitre de Saint Matthieu. Il y a, dans cette longue liste de noms, des bons comme des mauvais, des justes comme des criminels, des voleurs, des adultères : nous pouvons aisément nous y reconnaître, et prendre rang nous aussi, avec nos péchés, pour préparer et hâter l’avènement du Seigneur, dans une purification progressive du temps, qui dépend de notre purification intérieure.
Tel est le déroulement liturgique auquel nous convie l’Église pour remplir ce temps de l’attente. Si nous sommes attentifs, nous pourrons en faire un temps fort de l’année, dans un effort de préparation, de purification de notre être intérieur, de renouvellement de notre foi.
Célébrer l’Avent, c’est célébrer l’attente de la venue du Christ dans l’histoire des hommes, c’est aussi célébrer la venue du Christ dans notre propre cœur, vouloir l’accueillir dans cette attitude d’humble obéissance que nous enseigne la Vierge Marie : « Qu’il me soit fait selon ta parole », selon ta volonté, non la mienne.
Célébrer l’Avent, c’est également vivre une autre attente, celle de la seconde venue de Notre Seigneur, vers laquelle nous devons tendre de tout notre être, de toute la ferveur de notre foi :
« L’Esprit et l’Épouse disent : « Viens ! » Que celui qui entend, dise : « Viens ! » Que celui qui a soif, vienne […]
Ap 22, 17-20
Celui qui atteste ces choses dit : « Oui, je viens bientôt »
Amen !
Viens, Seigneur Jésus ! »
extrait d’une homélie du Père Michel Evdokimov
Né en 1930, le père Michel Evdokimov est un théologien et professeur de littérature comparée. Engagé dans l’œcuménisme, auteur de nombreux ouvrages et traducteur, il a longtemps desservi la paroisse de Châtenay-Malabry en région parisienne.
Comments are closed.