Du fait que nous confessons si fortement, avec toute la Tradition, la divinité du Fils, contre Arius et contre les témoins de Jéhovah, que nous confessons si fortement la divinité et l’existence personnelle du Saint Esprit, nous ne concevons pas dans la Tradition un Dieu qui ne soit pas Trinité et par conséquent un Dieu qui ne soit pas Amour.
Un Être divin en trois hypostases
Nous insistons beaucoup sur le Dieu fait chair, mais aussi essentiellement sur le fait qu’Il est le Créateur, Il est Dieu et non pas une créature. Le Saint Esprit aussi est Dieu et non pas une créature. Par conséquent, Dieu est trois et cela est une partie essentielle de la Tradition. Saint Jean nous a révélé (je dis bien révélé) une vérité fondamentale absolue : que Dieu est Amour1. Or, un Dieu qui ne serait pas plusieurs personnes ne pourrait pas être Amour. Si l’on s’aime uniquement soi- même, ce n’est pas de l’amour.
L’amour, c’est lorsque l’on sort de soi-même pour aimer l’autre et que l’on s’identifie à l’autre.
Dans la pédagogie biblique, l’aspect sévère de Dieu apparaît davantage au commencement et la révélation du Dieu amour est progressive, mais ce n’est pas pour cela qu’Il n’a pas toujours été Amour. Saint Jean ne dit pas simplement que Dieu aime, mais qu’Il est Amour. C’est la « définition » même de l’Être de Dieu.
On a perdu le sens de la distinction que les Pères ont faite entre l’Être et les Personnes. Les musulmans et les Juifs s’imaginent, lorsqu’ils nous entendent parler, que nous croyons en trois dieux. Non, il n’y a qu’un Être divin, qu’un Amour divin, qu’une volonté divine. Il n’y a qu’un seul Dieu, mais ce Dieu est trois, trois hypostases (c’est le vrai mot théologique). Le mot personne est un peu trompeur parce qu’il fait penser à des individus. Or le Père, le Fils et le Saint Esprit ne sont pas des individus.
Les hypostases divines n’existent qu’en relation d’amour les unes avec les autres et c’est parce qu’Ils sont trois, qu’Ils s’aiment d’un amour parfait, total, qu’Ils sont un seul Être.
Un homme et une femme, quand ils s’aiment, aspirent à devenir un seul être. Ils n’y réussissent jamais totalement parce qu’ils sont des humains et non des dieux, mais ils aimeraient être un et cette soif d’unité est un peu l’image de Dieu dans l’homme : « Dieu créa l’homme à son image, homme et femme Il les créa. »2 Il les créa pour que, par leur amour, ils tendent vers l’unité, de même que dans l’Église nous tendons à l’unité. Nous tendons à, nous tendons vers, nous ne réalisons malheureusement qu’horriblement mal cette unité, mais en Dieu tout cela est parfait.
Donc, parce que Dieu est Amour, Il est trois personnes : le Père, le Fils et le Saint Esprit sont tous les trois Dieu, mais Ils sont tous les trois le même Dieu. Ils ne sont pas trois objets dans l’espace, Ils sont trois Personnes, l’Un dans l’Autre. « Je suis dans le Père et le Père est en moi » (Jn 14,11), dit le Christ.
Tout cela fait partie de la Tradition. L’Église a mis des siècles à en préciser le sens, par rapport aux différentes hérésies des premiers siècles. L’Incarnation du Verbe et l’aspect trinitaire de Dieu ont été l’objet des sept conciles œcuméniques. Il a fallu huit siècles pour vraiment clarifier cela.
Père Cyrille Argenti
Le père Cyrille Argenti fut une figure majeure de l’orthodoxie en France au XXe siècle. Résistant, moine et prêtre à Marseille, il a œuvré à l’avènement d’une orthodoxie d’expression locale ainsi qu’au dialogue oecuménique.
Source : https://monastere-de-solan.com/content/24-pere-cyrille
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