Voici quelques mots sur l’origine historique et le sens de cette fête, que certains comparent au Saint et Grand Vendredi, dans les solennités pascales.
Au début du 4e siècle, l’empereur Constantin, devenu Saint Constantin (fêté le 21 mai), mais qui à l’époque n’était pas encore baptisé ni chrétien, se préparait à une bataille. Peu avant, il a vu dans le ciel un signe, ressemblant à la Croix, et a entendu une voix lui disant : « Par cela tu vaincras ». Obéissant à cette vision et à cette voix, il a fait représenter sur les boucliers de ses combattants le signe qu’il avait vu, la Croix. Plus précisément, ce qu’il avait vu fut un signe formé des lettres grecques superposées X et P, les deux premières lettres du mot Christ, et ce signe est devenu un symbole que l’on appelle chrisme, souvent utilisé dans l’art chrétien pour désigner à la fois le Christ et le mystère de la Croix.
Ayant été victorieux à cette bataille, l’empereur a envoyé sa mère, l’impératrice Sainte Hélène, à Jérusalem, pour qu’elle y recherche la Vraie Croix, celle sur laquelle le Christ a été crucifié, et les instruments de sa Passion vivifiante.
Cette fête est celle de l’Exaltation de la Croix : une fois retrouvée, la Croix a été montrée par l’évêque de Jérusalem à l’assemblée des chrétiens et des pèlerins, et depuis lors cet événement est commémoré chaque année, devenu l’une des douze grandes fêtes de notre année liturgique. Ce geste d’exaltation de la Croix est représentée sur l’icône de la fête, où l’on voit l’évêque élever la Croix devant tous.
Au 4e siècle à Jérusalem, la veille de cette fête, le 13 septembre, on commémorait avec une grande solennité la dédicace de l’église de la Résurrection, construite sur l’emplacement du Saint Sépulcre. Cette fête est toujours célébrée dans l’Église, comme en témoignent les textes liturgiques, mais avec moins de solennité que la Croix : son Exaltation a pris en quelque sorte le dessus. Dans l’une de ses homélies, Saint Sophrone, évêque de Jérusalem au 7e siècle, constate qu’à son époque déjà, l’Exaltation de la Croix est plus solennelle que la commémoration précédente, en l’honneur de la Résurrection, mais il déclare ne pas pouvoir expliquer cette évolution. Nous pouvons ainsi observer qu’à travers le temps et l’histoire, il arrive que la solennité ou l’importance d’une fête a pu varier. Cela n’enlève rien à la portée universelle de l’Exaltation de la Croix, véritable soutien et appui dans notre combat contre Satan et ses anges déchus, ennemis du genre humain, car selon le mot de l’Apôtre Pierre nous exhortant à la vigilance, « le diable, votre adversaire, rôde comme un lion rugissant, cherchant qui dévorer » (I P 5,8). C’est cette vénération de la Croix qui nous fortifie dans le combat : qu’elle nous soit un ferme appui dans notre lutte contre tout ce qui en nous et autour de nous s’oppose encore à notre cheminement vers Dieu. Depuis la Résurrection du Christ, après son passage par la Croix, il nous est donné de pouvoir relier toutes nos souffrances et contrariétés à ce qu’a enduré le Christ, car par la Croix Il a vaincu toutes nos épreuves en les faisant aboutir à la Résurrection, et celle-ci concerne non le Christ seul, mais avec Lui tout le genre humain.
N’oublions donc pas que chacune de nos difficultés, même les plus petites, ont été ainsi assumées et vaincues par le Christ : grâce à son triomphe sur la Croix, Il nous fait déjà participer d’avance à la Résurrection universelle, promise par Lui à tout le genre humain.
Père André Lossky
Le père André Lossky est liturgiste, spécialiste du typicon, professeur émérite de théologie liturgique à l’Institut Saint-Serge (Paris) et retraité de la fonction publique. Il dessert actuellement la paroisse orthodoxe d’Agen.
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